Un compromis rare entre députés de gauche, du centre et de droite pourrait débloquer des mesures clés pour atténuer la crise du logement. Socialistes, communistes, écologistes, Horizons, MoDem et Ensemble pour la République se sont entendus sur deux axes principaux : un statut fiscal incitatif pour les bailleurs privés et une réduction des prélèvements sur les bailleurs sociaux.
Le statut du bailleur privé, inspiré d’une proposition de l’ancienne ministre Valérie Létard et enrichi par le député Horizons François Jolivet, prévoit un amortissement fiscal de 3,5 % sur 80 % de la valeur du logement, plafonné à 10 000 euros par an et limité à deux logements par foyer. En contrepartie, les propriétaires devront fixer des loyers modérés et louer à des ménages aux revenus modestes.
L’autre mesure phare concerne la réduction de loyer de solidarité (RLS), un prélèvement sur les recettes des bailleurs sociaux, que les députés proposent de diviser par deux, passant de 1,4 milliard à 700 millions d’euros. « Ces deux mesures sont indissociables », insiste le député socialiste Inaki Echaniz, qui conditionne son soutien au statut des bailleurs privés à un engagement sur la RLS.
D’autres ajustements fiscaux, visant à éviter les abus, recueillent un soutien large, bien que les votes finaux restent incertains. « Ces leviers pourraient apporter une première réponse à la crise », estime Echaniz, tout en appelant le gouvernement à intégrer ce compromis dans son ensemble.
Du côté du ministère de la Ville et du Logement, on souligne que la volonté est de laisser le Parlement construire ses propres solutions. « La balle est dans le camp des élus », résume-t-on, tout en reconnaissant que ces mesures pourraient redynamiser un marché immobilier en difficulté. Pour les associations de locataires, ce compromis reste trop timide. « Sans encadrement strict des loyers et sans construction massive de logements sociaux, ça ne suffira pas », critique la Confédération nationale du logement (CNL).
Malgré ces réserves, cet accord transpartisan marque une avancée notable dans un domaine souvent clivé. « Quand il s’agit de logement, tout le monde sait qu’il faut agir », résume un député. « Reste à voir si le gouvernement suivra. »
Immobilier : une reprise timide à la rentrée 2025, entre regain d’activité et incertitudes politiques
Après deux années noires, le marché immobilier français donne enfin des signes de reprise. Mais à la rentrée 2025, le redémarrage s’avère moins vigoureux qu’espéré et reste fragile face à des incertitudes politiques et économiques persistantes.
Un volume de transactions en hausse, mais toujours en retrait
L’année 2025 devrait se conclure avec environ 925 000 transactions, soit une hausse de +8,2 % par rapport à 2024. Ce chiffre replace le marché au-dessus de la barre symbolique des 900 000 ventes annuelles. Le Groupe BPCE estime même que le volume pourrait atteindre près de 960 000, tandis que d’autres acteurs évoquent un rebond supérieur à 10 % sur le premier semestre. Après l’effondrement des ventes en 2024, ce sursaut est bienvenu. Reste qu’on demeure loin des niveaux records d’avant la pandémie, où plus d’un million de transactions étaient enregistrées chaque année.
Des prix qui se redressent doucement Sur le plan des prix, l’Indice des Prix de l’Immobilier (IPI) affiche une progression nationale contenue de + 0,8 % en un an. Mais la tendance varie selon les territoires. Certaines grandes métropoles repartent à la hausse :
+ 3,6 % à Bordeaux, +2,5 % à Lyon et +2,3 %à Paris au 1er septembre 2025. En Île-de-France, la progression reste timide (+0,4 %), mais elle marque un retournement après plusieurs trimestres de baisse. L’INSEE confirme cette tendance avec une hausse nationale de +0,6 % au premier trimestre, portée par le neuf (+2 %) tandis que l’ancien reste quasi stable (+0,4 %). Selon les notaires du Grand Paris, appartements et maisons affichent une progression de +0,3 à + 0,4 % sur le trimestre. Paris retrouve un prix moyen proche de 9 530 €/m², encore 11 % en dessous de son pic de 2020, mais assez pour stabiliser un marché où un vendeur sur cinq revend encore à perte.
Crédit : un frein toujours puissant
La reprise aurait pu être plus forte si les taux d’intérêt avaient poursuivi leur décrue. Or, malgré les anticipations, la barre des 3 % sur 20 ans n’a pas été franchie. Les taux se maintiennent autour de 3,25 % à la rentrée. Pour les acheteurs, la situation reste contraignante : les mensualités sont lourdes, notamment dans les zones tendues, et limitent la capacité d’emprunt des ménages.
Toutefois, les conditions d’achat s’améliorent légèrement. Le délai d’amortissement moyen est retombé à 4 ans et 8 mois, et le pouvoir d’achat immobilier s’est redressé à 72 m², niveau équivalent à celui de 2022. Ces signaux nourrissent l’idée d’un nouveau cycle plus équilibré.
Le marché locatif se calme
Après une flambée des loyers en 2023–2024 (+4,2 % sur un an), la hausse ralentit nettement : +1,5 % à la rentrée 2025. L’indice de référence des loyers (IRL) a progressé de +1,4 % au premier trimestre, contre +1,8 % précédemment. Le marché se stabilise donc, ce qui allège un peu la pression sur les locataires, même si certaines zones restent très tendues.
Les obstacles structurels persistent Si le marché montre des signes positifs, les fragilités demeurent nombreuses. L’offre reste insuffisante face à la demande, en particulier dans les grandes villes et les zones d’emploi dynamiques. Le ralentissement de la construction neuve aggrave cette tension : malgré une stabilisation récente des permis de construire, le niveau global reste inférieur de près d’un quart à celui qui prévalait avant la crise sanitaire.
À cela s’ajoutent des incertitudes politiques et économiques. L’instabilité gouvernementale, la dette publique élevée et le manque de visibilité sur la politique du logement inquiètent les acteurs. Les perspectives internationales pèsent également : les taux longs restent sous pression, et la Banque centrale européenne n’envisage pas de baisse significative en 2026.
2026 : vers un nouvel équilibre ?
Pour Thomas Lefebvre, vice-président data de SeLoger et Meilleurs Agents, « même si elle est restée en deçà des attentes, la reprise du marché immo-bilier est engagée ». Il anticipe environ 960 000 transactions en 2026 et une hausse des prix comprise entre +2 et +3 %. Selon lui, la stabilisation des taux et la reprise progressive des prix devraient faciliter les reventes aujourd’hui contraintes à perte, ouvrant la voie vers un nouvel équilibre.
Cette perspective reste conditionnée à la capacité du gouvernement à rétablir a confiance, simplifier les dispositifs de soutien et offrir une vision claire du logement pour les prochaines années. Car si les ménages ont retrouvé un certain pouvoir d’achat immobilier, leur confiance demeure fragile : l’épargne reste élevée (près de 19 % du revenu disponible), signe d’attentisme face aux incertitudes.
À la rentrée 2025, le marché immobilier français sort péniblement de deux années de crise. Le rebond des transactions et le frémissement des prix dans les grandes villes redonnent espoir aux professionnels. Mais la reprise reste trop faible pour effacer les déséquilibres structurels et les incertitudes politiques. L’année 2026 pourrait marquer un tournant, à condition que l’offre de logements se relance et que les acteurs publics donnent un cap clair. D’ici là, le marché demeure suspendu à une confiance qui reste à reconstruire.